Comme la liberté est indissociable de la responsabilité, la satisfaction ne peut durablement se réaliser aux dépens des autres ; elle est profondément liée à la satisfaction d’autrui. En effet, ma liberté ne peut pas se concevoir et se construire sans que je réfléchisse à la liberté des autres et sans que les autres puissent bénéficier des mêmes droits que moi. Sinon, je tombe dans une forme de totalitarisme en adoptant le profil d’un tyran. Ma liberté, comme ma satisfaction, ne peuvent pas se construire aux dépens d’autrui.
C’est pourquoi, je complète et précise mes vœux pour 2018… et les années à venir ! Je vous souhaite de nombreuses satisfactions dans votre activité professionnelle en activant des ressources qui contribueront à faire progresser votre entreprise ou organisation dans l’esprit d’une entreprise humaniste.
Il est temps de dépasser le slogan « Il faut remettre l’humain au centre » !
Ce slogan qui fleurit dans les chartes d’entreprise ou dans les politiques du personnel est rarement suivi de résultats concluants dans les faits. Pour quelles raisons ?
D’une part, cette affirmation est trop souvent là pour embellir l’image de l’entreprise, utilisée comme un argument de marketing partiellement vide de sens dans la réalité quotidienne. Ou alors toutes les conditions matérielles du travail sont excellentes, mais le sens reste peu apparent, voire absent. Ou encore la notion d’appartenance à l’entreprise a été poussée tellement loin que les collaborateurs en deviennent des robots à son service jusqu’à s’imposer une forme d’esclavage au service de la performance et des résultats exclusivement. Là, la politique des bonus peut jouer un rôle très malsain, mais diablement efficace, en transformant la place de travail en une prison dorée.
D’autre part, remettre l’humain au centre des préoccupations de l’entreprise se réfère la plupart du temps aux collaborateurs de cette organisation. Eh bien, je l’affirme, cela ne suffit largement pas : le personnel d’une entreprise ne peut pas se satisfaire d’être choyé si d’autres conditions ne sont pas remplies, notamment si les produits du travail contribuent à péjorer gravement les ressources terrestres, nuisent à la santé des clients et se moquent des fournisseurs, par exemple.
Une alternative passionnante existe : les entreprises humanistes
Je vais largement m’inspirer d’une lecture faite en 2017, « Les entreprises humanistes. Comment elles vont changer le monde. » de Jacques Lecomte, paru aux Editions Les Arènes en 2016.
L’auteur a recueilli une abondante documentation et a également construit son ouvrage sur de multiples observations, témoignages, ainsi que sur une littérature économique, sociologique, philosophique d’une grande richesse. C’est à mon avis un ouvrage majeur dont la lecture devrait être imposée dans les hautes écoles à tous les futurs économistes d’entreprise et spécialistes RH. Il est construit autour de plusieurs parties :
- l’épanouissement au travail
- des relations d’équipe harmonieuses
- l’entreprise au service de la société
- les réponses aux défis environnementaux
- repenser la raison d’être des entreprises.
Qu’est-ce qui distingue alors une entreprise humaniste ?
En premier lieu, je suis convaincu que c’est une entreprise dont l’actionnariat et l’ensemble du personnel, de la direction, en passant par les cadres et en allant jusqu’aux collaborateurs de la base, sont conscients du fait qu’ils sont des individus, dans leur unicité, qui ne souhaitent pas se subdiviser en plusieurs personnes ou rôles dans leur vie ; qu’ils peuvent vivre dans leur entreprise, comme dans leur famille ou leur communauté de vie en s’appuyant sur des valeurs identiques, en pleine cohérence.
En somme, ils développent leurs responsabilités d’humain partageant une humanité commune. La conscience de ces responsabilités globales et complexes chapeautent de manière harmonieuse, sans rupture, celles de contributeur au service d’une organisation, d’une entreprise.
Jacques Lecomte propose une autre définition de l’entreprise : « l’entreprise est une communauté de personnes agissant ensemble au service du bien commun. » C’est changer complètement de paradigme par rapport aux entreprises dont il est souvent question dans les médias depuis de nombreuses années; surtout celles qui ont assuré la une des organes de presse avec les Paradise Papers, des produits à l'obsolescence programmée ou des problèmes de production non respectueuse de la santé des consommateurs ou travailleurs, à titre d’exemples.
Qu’est-ce qu’implique le « bien commun » pour une entreprise ?
Selon notre auteur, une entreprise qui a pour raison d’exister de se mettre au service du bien commun a les caractéristiques suivantes :
- elle donne du travail qui a du sens pour la personne qui l’accomplit, ainsi que des conditions de travail satisfaisantes ;
- elle entretient des relations honnêtes avec ses fournisseurs ;
- elle a une production de qualité, que cela soient des produits ou des services, pour le client ;
- elle a un impact positif sur la société environnante (diminution du chômage, de la pauvreté, services rendus à la communauté) ;
- elle garantit un respect de l’environnement complet (il ne s’agit pas que de gestion des déchets ou de l’énergie nécessaire à sa production, mais également des cycles de production, des ressources puisées et de durabilité), voire son amélioration.
Alors, en quoi mes vœux consistent finalement ? Ne sont-ils pas un énorme poids ?
A travers ma carrière professionnelle de plus de 40 ans, j’ai vu de nombreux visages s’éclairer lorsque les personnes avaient compris le sens de leur travail, d’une part, et notamment intégré le fait d’être utiles aux autres. Et depuis que je pratique le coaching, je vois de manière encore plus accentuée à quel point cela est important. L’homme ressent beaucoup de joie lorsqu’il perçoit qu’il a pu aider un autre, qu’il a produit un bel objet de qualité ou que grâce à son service et à ses compétences professionnelles le bien-être d’un autre s’est accentué.
De même, je me sens beaucoup plus heureux lorsque je travaille au sein ou à la tête d’une équipe où les relations sont harmonieuses. La confiance est une condition de base pour cela, que cela soit la confiance dans sa direction, dans ses collaborateurs ou entre collègues. Des relations harmonieuses permettent de travailler en bonne collaboration. On passe à la coopération qui, entre autres, accroît également les performances. La coopération, comme le dit Jacques Lecomte, est également une marque de citoyenneté ; elle se construit sur une vision claire et commune de l’objectif à atteindre et dans des conditions qui garantissent un traitement juste et digne. La notion d’empathie prend ici toute sa dimension dans une communication équilibrée ; les trois facteurs suivants devant impérativement avoir leur place : la volonté, la disponibilité, la curiosité (voir mon article "L’empathie au service d’une nouvelle culture d’entreprise" – 2017).
Pour cela, je ne dois pas oublier de me mettre au service des autres : aide spontanée aux collègues en difficulté, humilité également chez les cadres, avoir le souci des fournisseurs et des clients, etc.)
Il s’agit pour chacune et chacun de cultiver la bienveillance qui est source de joie, donc d’efficacité également. C’est là que le besoin de reconnaissance trouve sa satisfaction, mais je trouve aussi ma satisfaction en témoignant ma reconnaissance et en accordant toute l’attention à ce geste et à ce que je peux lire dans le regard et le non verbal. La reconnaissance est un réflexe qui doit devenir mutuel. La bienveillance consiste également à reconnaître et à laisser la place à ce qui a bien marché, ce qui fonctionne bien, à le faire apparaître et à le relever.
Enfin, je peux apporter ma contribution à l’apaisement des conflits. Cultiver une posture de médiateur, « un électricien chargé de rétablir le courant des relations humaines », selon notre auteur. S’abstenir d’en rajouter, en cas de conflit, de faire courir des bruits, de prendre parti et de créer des alliances contre.
Finalement, mes vœux pour 2018… et les années à venir, sont que vous puissiez trouver de nombreuses satisfactions dans votre travail, votre emploi, en mettant l’accent sur vos compétences relationnelles et humanistes, contribuant à accentuer la posture humaniste de votre organisation ou entreprise. Bonne et heureuse année!